Après des études d’édition à l’université de Paris XIII sous la direction de Jean-Marie Bouvaist, je débute chez Gallimard Jeunesse, dans l’équipe de Pierre Marchand (1980). Je me spécialise assez vite dans les collections de fiction (Folio Benjamin, Folio Cadet).
En 1986, quand Gallimard Jeunesse fait son grand virage vers le documentaire, départ pour Casterman, qui n’a pas alors d’éditeur jeunesse fiction en France. Des collections de lecture d’abord (épopées, romans policiers, aventures, récits de vie…) devenues Romans Casterman en 1995 (Jean-François Chabas, Jo Hoestlandt, Claude Gutman…). Puis l’ensemble du catalogue fiction avec les albums : Les derniers géants et l’Atlas des géographes d’Orbae, de François Place ; mais aussi Emeline qui voit tout, de Pierre Coran, premier livre bi-graphique braille/écriture noire ; un roman sur une fille dingue de foot, déjà (Fous de foot, Fanny Joly et Christophe Besse) ; les premiers livres de Bénédicte Guettier (Le papa qui avait dix enfants) ; L’œuf du coq, de Hubert Ben Kemoun et Bruno Heitz ; Les deux arbres, d’Elisabeth Brami et Christophe Blain et le Carnet polaire de celui-ci, entre autres… En une douzaine d’années s’est construit un catalogue fait de livres uniques et de belles rencontres.
En 1999, alors que Casterman vient d’être racheté par Flammarion, Pierre Marchand me propose de venir prendre en charge le catalogue Hachette Jeunesse Roman. La Bibliothèque Rose, le Livre de poche Jeunesse… Difficile de refuser. Pendant deux ans et demi nous travaillons d’arrache-pied pour rénover ce magnifique catalogue. Jusqu’au décès brutal de Pierre Marchand, ce grand éditeur.
En juin 2002, mon chemin se poursuit alors du côté de la presse jeunesse, Georges Sanerot m’ayant confié la rédaction en chef des journaux de lecture du pôle enfance de Bayard presse : Mes premiers J’aime lire, J’aime lire, Dlire (devenu depuis J’aime lire max). Auxquels s’ajoutera Je Bouquine (2010). Un nouveau métier, proche et différent de celui que j’exerçais jusque-là. Il s’agit toujours d’être éditrice de romans, mais à l’intérieur du cadre de la presse. Chaque mois, l’équipe de rédaction de ces quatre magazines donne rendez-vous à 3 millions de lecteurs…
A ce poste pendant 12 ans, j’y ai exploré d’une nouvelle façon la nécessité de prendre en compte le lecteur dans la démarche éditoriale : un rendez-vous mensuel avec autant de lecteurs est un vrai bonheur et une grande responsabilité. Ces douze ans furent aussi bien occupés par la régénération du cahier bande dessinée de J’aime lire. A mon arrivée, Jacqueline Cohen venait de décider d’arrêter Tom-Tom et Nana, séisme majeur pour le premier mensuel jeunesse français ; à mon départ, Ariol (Emmanuel Guibert et Marc Boutavant), Anatole Latuile (Anne Didier, Olivier Muller et Clément Devaux) et La Cantoche (Nob) avaient magnifiquement pris la relève.
En 2007, surprise par la teneur du courrier parental reçu à J’aime lire, j’ai proposé de créer une collection de petits guides pour les parents, désireuse de les accompagner le plus simplement possible dans leur rôle pour tout ce qui touche à la culture de leurs enfants (lecture, écriture, Internet…). Ce seront Les petits guides J’aime lire, dont je me suis autorisée à écrire le premier titre : Mon enfant n’aime pas lire, comment faire ? (Bayard édition)
Par ma formation universitaire (ma génération a inauguré ce cursus aujourd’hui courant), réfléchir à mon métier comme à un motif de recherche a toujours fait partie de ma façon de l’exercer. Mon DEA soutenu en 1990 en est sans doute la meilleure preuve (L’édition pour la jeunesse pendant la Seconde Guerre mondiale en France, sous la direction de Roger Chartier, EHESS). Aussi, en 2014, prendre la rédaction en chef de La Revue des livres pour enfants (Bnf-Centre national de la littérature jeunesse) me sembla être une passionnante bifurcation : continuer à prendre part à ce métier mais en changeant de point de vue… Dans une liberté immense, 38 numéros et hors-séries (2014-2020) m’ont permis de questionner et comprendre plus encore ce monde de la littérature et de l’édition jeunesse qui me passionne. Et de faire mes armes en tant que critique littéraire, ce métier si difficile et si délicat.
Chemin faisant, j’ai toujours pris le temps de lire des manuscrits -pour adultes ou pour enfants- et de conseiller leurs auteurs et autrices, dire avec le plus de justesse possible ce qui faisait force et faiblesse dans ces histoires à naître. Ecrire est suprêmement difficile, être lu.e l’est peut-être encore plus. Cette lecture initiale et particulière convoque professionnalisme, bienveillance et sincérité. C’est un exercice qui me passionne et, depuis mars 2020, c’est devenu mon activité principale – motif de ce site qui me sert de carte de visite.
J’ajouterai que j’ai grandi en Bretagne, au bord de la mer, et vis à Paris depuis plus de quarante ans. J’ai trois enfants à qui je dois énormément. Je me déplace à vélo -c’est important- et je joue de la clarinette avec peu de talent mais beaucoup de conviction : experte ici, inexperte là, une conjonction salutaire.